Créations d'olivier
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Il y a dans mes mains une mémoire qui s’appelle Alfred. Un héritage doux comme une odeur de sciure, têtu comme une fibre de chêne. On croit souvent que j’ai choisi le bois, mais c’est lui qui m’a adopté, le jour où mon grand-père m’a ouvert la porte de son atelier.

Là, dans cette caverne baignée de lumière dorée, Alfred régnait. Les marteaux et les gouges lui obéissaient au doigt et à l’œil. Mais surtout, il y avait ces jeux en bois, en cours de naissance, qui attendaient ses gestes experts comme des enfants impatients d’être libérés de leur bloc brut.

Alfred avait une philosophie simple: un jeu doit faire rire et réfléchir, mais avant tout, il doit durer plus longtemps que l’enfance. Il choisissait chaque morceau de bois comme on choisit un compagnon de route. Il voyait déjà l’avenir d’une planche. Une toupie qui tournerait jusqu’à faire saluer le soleil. Un petit cheval à bascule qui porterait les rêves des jeunes cavaliers. Un jeu de construction qui survivrait à toutes les batailles imaginaires.

Je le regardais faire, les yeux brillants. Ses mains savaient exactement où le bois voulait aller. « Écoute-le, disait-il, il connaît déjà le jeu qu’il veut devenir. » Alors j’apprenais: la patience du ponçage, la précision du ciseau, la douceur d’un vernis qui protège sans étouffer.

Chaque création d’Alfred avait une âme. Elles n’étaient pas que des jouets, mais des souvenirs en bois. Des éclats de rire sculptés dans du hêtre, la joie solidifiée en pin. Les enfants qui les touchaient emportaient avec eux un peu du cœur de mon grand-père.

Aujourd’hui, c’est à mon tour de donner vie à ces futurs compagnons de jeu. Lorsque j’assemble une pièce, je sens sa présence. Lorsque je trace une courbe parfaite, j’entends presque son approbation. Et lorsque je vois un enfant sourire devant une de mes créations, je sais qu’Alfred sourit quelque part, caché dans les veines du bois.

Le bois est devenu mon lien à lui, un fil solide entre passé et avenir. Tant que je fabriquerai des jeux qui rassembleront les générations, la passion d’Alfred continuera de vivre en mouvement, en rire, en émerveillemen

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